“This Tournament is THE Tournament. And it’s not gonna happen again and again. But it has to happen. It might be what they don’t want, but that doesn’t matter anymore. I’m here and ready to strike.”
La Finale est là. Il est temps de faire les choses proprement et de s’activer à constituer une défense honorable, et ce même si DEXTER jouit d’une réputation plus que bonne de part chez nous. Il fallait au moins que je le fasse une fois, et maintenant me parait un moment adéquate pour frapper un grand coup. Je connais peu de personnes qui ont vu la série et ne l’ont pas aimé (les seuls avis négatifs se résumaient à du « Oui mais j’aime pas la gueule de Michael C. Hall », ce qui est un argument de poids), donc je pourrais faire une justification d’une ligne disant que je vote DEXTER que ça n’y changerait rien. Mais mon poil de main a fané, il est temps de faire les choses sérieusement. Ce qui suit est moins une défense qu’un cri du cœur.
“They see me. I’m one of them. In there darkest dreams.”
DEXTER est tout d’abord une très bonne série pour deux points structurels très bien peaufinés et qui sautent rapidement aux yeux : l’écriture et l’ambiance.
S’il est vrai que la série ne brille pas par une originalité au niveau des intrigues, en revanche elle relève le niveau en étant très bien écrite. Explication : très peu d’éléments sont laissés au hasard, très peu d’incohérences apparaissent dans l’intrigue. Et c’est admirable ! Au lieu de nous fourguer des retournements de situation à gogo, on suit une histoire généralement très simple mais à laquelle on ne peut pas reprocher grand-chose. C’est comme si on arrivait dans One Piece en disant « C’est naze pour Dragon, c’est tellement évident que c’est pas impressionnant », alors qu’Oda a son intrigue depuis le début. DEXTER, c’est la même chose : on sent plus ou moins arriver les twists, ils n’en demeurent pas moins cohérent avec l’histoire d’ensemble (le plus admirable étant la résolution de la saison 2 qui recoupe quasiment tous les fils jetés) et sont généralement très bien mis en scène (avec un impératif très bien respecté du « une saison, une histoire »).
Parce que DEXTER, c’est aussi une mise en scène du tonnerre, qui passe aussi par l’ambiance. La caméra est une fenêtre au travers de laquelle Dexter s’exprime, ce qui implique une grande stabilité lorsque le personnage est sûr de lui et que la situation est sous son contrôle ; et un vacillement perceptible lorsque son univers s’effrite, sa confiance s’ébranle.
Pour couronner le tout, la ville de Miami a rarement été montrée avec autant de puissance visuelle. Elle est pour ainsi dire vivante et un miroir de ce que ressent Dexter : chaude à l’extérieur (climat), glaciale et déshumanisée à l’intérieur (lieux très peu engageant – la première cachette de l’Ice Truck Killer !). L’image qu’on en a n’en jamais figée, et elle continue d’explorer la ville dans tous ses recoins, toutes les ambiances possibles et imaginables. La série bénéficie, à ce propos, d’une grande ambiance sur les éclairages qui jouent parfois un rôle prépondérant : dans une scène de la saison 2, Dexter et Lila sont en voiture et une lueur verte se reflète sur eux ; lueur passant un instant au rouge sur les yeux de Lila, avant que son attitude devienne plus « maléfique ». De même, la BO contribue à se plonger dans le Miami dextérien, grâce à un mélange de musiques rythmées, douces, émouvante avec toujours une pointe de jazz, ainsi que des thèmes incroyablement marquants.


EVIL EVIL EVIL !
“Brother, friend, boyfriend – all part of my costume collection.”
Deuxièmement, DEXTER est une série qui densifie ses qualités grâce à un personnage principal passionnant. Dexter est un personnage froid, sans sentiment et essayant de se fondre dans la masse pour pouvoir continuer ses activités peu recommandables. Jusque là, tout va bien. Seulement, DEXTER fait parti de ses œuvres qui utilisent la voix-off avec une incroyable profondeur, donnant une seconde épaisseur à la série : le personnage étant déshumanisé, on suit ses réflexions sur le monde qui l’entoure, sur ces rites étranges qui ponctuent notre quotidien avec autant d’acidité que d’humour. Dexter est comme un nourrisson qui essaye d’interpréter, de comprendre le pourquoi du comment, là où personne n’irait se poser la question. C’est une qualité d’écriture qu’on retrouvait pas mal chez DESPERATE HOUSEWIVES et qui consiste, à chaque épisode, à dégager une thématique qui va trouver des réponses pendant tout l’épisode, avant que Dexter par l’intermédiaire de la voix-off, vienne conclure. A ce titre, Dexter est un personnage incroyablement évolutif, ne stagnant pour ainsi dire jamais. Malgré un code et des rituels ancrés, il doute en continue, il ose changer, il aspire à devenir meilleur.
Bien évidement, la galerie de personnages qui l’entoure au quotidien n’est pas en reste et bénéficie de développement peut-être moins mis en avant, mais tout autant complexe (une certaine simplicité se fait sentir, notamment parce que toute la série est perçue à travers les yeux de Dexter). Les plus intéressants restent néanmoins les personnages
spéciaux qui sont souvent les éléments perturbateurs de la vie de Dexter, des personnages-clefs dans l’intrigue des saisons. Ceux-ci (sans spoiler) ont toujours réussi à cadrer à une certaine thématique, qui veut qu’ils soient à la fois antagonistes et alliés de Dexter. Sous des apparences très manichéennes, DEXTER s’amuse à complexifier ses personnages pour perdre le spectateur dans la limite du Bien et du Mal.


Dexter et les rituels, une histoire d’amour !
“Am I a good person doing ‘bad’ things?”
L’une des grandes forces de la série est en effet de brouiller la vision qu’on peut avoir des personnages, qui sont quasiment tous sans exception à la fois mauvais et bons (dans un sens non-strict). Rares sont ceux qui ne penchent que d’un côté et qui n’ont pas de petits travers. Il arrive même que parfois, certains personnages puissent être catégorisés par l’impression qu’ils donnent au spectateur : j’en prends l’exemple du Sergent James Doakes, qui s’érige rapidement comme un casse-pied de première aux allures maléfiques (dans le sens où il est mauvais pour Dexter), alors que dans le fond, on ne peut pas lui reprocher son attitude !
Une des choses amusantes, aussi, avec la série, c’est la réaction de beaucoup de spectateurs ont eu en la voyant. Je connais des gens dans mon entourage qui, à la lecture du synopsis de la série, étaient presque outrés par l’immoralité du propos ; et qui ont vite retourné leur veste en la voyant et me disent maintenant que DEXTER est une série « trop » (!) morale. Et ce parce que, vous vous rendez ma bonne dame, il ne tue que ceux qui le méritent. Pour autant, cela justifie-t-il le crime ? Dexter lui-même sait que ses actes sont répréhensibles et peuvent le conduire à la peine de mort. Il n’empêche qu’il tue pour son Besoin, avec une ligne de conduite donnée par son père adoptif, le principe de Crime Légitime n’est pas prioritaire chez lui, simplement un accessoire qu’il a appris à manier.
DEXTER ne répond jamais clairement à cette question, simplement parce qu’il n’y a pas vraiment de réponse appropriée : Lundy expliquera la nécessité de tuer dans certains cas uniquement ; Doakes ne légitimera jamais vraiment le meurtre (un comble !) ect. Fait cocasse sur ce point, on remarque que l’une des sentences les plus justifiées de Dexter se soldera pas une remise en cause du personnage au début de la deuxième saison.


Dexter et le sang, un conte de fée dégoulinant !
"Be prepared" – that's my motto. The Boy Scouts and I have that in common. Of course, there's no merit badge for tonight's outing.
Enfin, si DEXTER est une série résolument sombre, elle se permet de distiller beaucoup d’humour et de réflexions savoureuses histoire de diversifier et de capter la sympathie du spectateur. Elle n’est pas à proprement parler une série comique, mais elle possède certaines répliques, certaines situations hilarantes qui n’ont rien à envier aux grands du genre. Dexter et sa naïveté d’enfant découvrant la vie, sortant des réflexions à la substance véridique mais formulées d’une manière si détournées que ça en devient énorme, c’est très fort ! Sans compter que la série se permet aussi de jouer sur de l’humour plus gras (Masuka et ses réflexions très beaufs) ou de répétition (Debra qui ne cesse de trouver des expressions hallucinantes pour jurer), qui apportent un ton léger et décompressent l’intrigue sans pour autant en faire perdre la moelle du suspens. Certains dénouements de situations se révèlent particulièrement savoureux et l’éclat de rire n’est jamais très loin (le portrait robot de l’enfant cubain, la réplique du geek-psychopathe lors de son face à face avec Dexter, la dernière scène de la saison 1 !!).
DEXTER se permet aussi de jouer sur ses propres codes, tournant en dérision son concept gore et malsain. Le générique est l’exemple le plus parlant d’un petit déjeuner banal qui, sous les caméras, se transforme en horreur (et qui sera lui-même repris plus tard). De même, le début de la saison 2 est une reprise hilarante de la première, preuve que le second degré n’est pas absent de la série. Et les références sont légions dans les titres des épisodes, clin d’œil amusant à d’autres références (sans compter le fait que Dexter emprunte le nom de Patrick Bateman pour emprunter des substances contrôlées !).


Du comique de situation au délire sous ecstasy en passant par les jeux de mot. Y en a pour tous les goûts !
En définitif, DEXTER est un mélange subtil de noirceur et d’humour, d’ambiance latino-cubaine et d’hangars vides et froids, d’intrigues simples et pourtant complexes. Une série qui a de la gueule, quoi. Voilà pourquoi je n’hésite pas une seule seconde à lui donner ma voix, quelque soit les séries en face (The Shield m'a l'air d'être une très bonne série, mais entre une série que je connais et que j'adore et une autre prometteuse que je n'ai jamais vu, le choix est vite fait pour la finale !), parce qu’elle le mérite amplement !