C'est vrai que les défenseurs fervents d'Askeladd ont disparu petit à petit après la Vraie finale. En même temps, peut on leur en vouloir quand après avoir fait le plus dure contre, peut être, le véritable favori, et le personnage le plus populaire de ce Grand Tournoi: Kamina.
C'est vrai qu'à côté Arès fait pâle figure, tout comme ses ardents défenseurs qui, pour exister se doivent de spammer le topic.
Peut on leur en vouloir? Je dis non, Arès The Vagrant Soldier est une excellente oeuvre de ce que j'ai pu en lire, et de ce que j'ai pu voir ici grâce aux forcenés du clavier. C'est peut être mon côté vieux con, mais en vieillissant, j'ai de plus en plus de mal à m'attacher à des héros jeunes. Dans le shonen de base parce que je les trouve bruyants, pleins de couleurs et de joie de vivre alors qu'en général ils vivent pour tuer les autres ou à la rigueur se battre pour gagner du pouvoir(Naruto=ninja, Bleach=dieux de la mort, One Piece=pirates). Ces trois piliers du shonen jump qui sont connus dans le monde entier voient leurs héros se battre contre des adultes, ils gagnent tout le temps (ou presque), ne meurent jamais ...
J'en conviens cependant qu'Arès ne se range pas dans ce registre. Je le mettrais avec Gatsu jeune, ou encore Thorfinn de Vinland Saga. Comme l'a fait remarqué DuK à juste titre, ce sont des personnages issus de seinen. Ils s'inscrivent donc dans des mondes beaucoup plus sombres, et leur histoire personnelle bien que triste, ne tourne pas sur du mélodramatique indigeste. Et même si ils ont en général des capacités physiques au dessus de la moyenne qui leur permet de survivre dans ce monde violent, ils n'en restent pas moins faillibles.
Nez en moins. Ah non, on dit pas ça comme ça, je recommence.
Néanmoins, comme je le disais plus haut, c'est peut être mon côté vieux con qui me fait dire ça, mais je tiens à le dire.
Des enfants soldats, ça existe depuis des millénaires, et ça continue toujours aujourd'hui d'exister. Ces gamins à qui l'ont fait traverser l'enfer, et bien, il n'y a rien de bon à en raconter. Il faut certes en parler, mais je trouve que les glorifier grâce à des histoires qui en font des héros, et bien ça me dérange.
Là, on se retrouve à une limite narrative qu'il est difficile de faire sortir des lieux communs. Dans son flash back, Yukimura se moque lui même du récit qu'il fait dire à Askeladd.
"Quelle histoire pitoyable, c'en est à en avoir les larmes aux yeux"
On peut d'ailleurs souligner que le développement de Thorfinn se fait avec une ellipse de 10ans, qui fait qu'on retrouve le héros âgé de 16ans. On évite donc tout le pathos, et les trucs chiants qui en découlent. Throfinn est heureusement un personnage très sombre et antipathique peut être justement pour éviter de tomber dans les clichés navrants.
Vous remarquerez je n'en doute pas si vous ne l'avez pas encore fait, que la plus part des livres/films/jeux qui mettent en avant des adolescents sont pour la plus part emprunts d'une naïveté affligeante couplées à un monde adulte très flous qui se reposent constamment sur les épaules de la jeune génération. Beyblade metal fury en est un excellent exemple.
Je ne connais pas suffisamment Arès malheureusement pour en faire une analyse plus aboutie, et je ne veux pas démolir gratuitement un personnage que je connais si peu.
RED, un peu plus haut compare Askeladd à Gambino. Je veux bien qu'un rapprochement soit fait entre deux hommes faits pour la guerre qui ont à leur charge la gestion d'un gamin. Mais la comparaison s'arrête là. La relation entre Guts et Gambino est bien plus malsaine. Entre filiation, esclave, rancoeur d'une part et amour paternel non assouvi de l'autre. Thorfinn et Askeladd ont une relation beaucoup plus claire. L'un veut tuer l'autre, l'autre paye un tribut pour avoir tuer le père du morveux. Askeladd exploite Thorfinn, c'est certain, mais dans un certains nombre d'échanges, il essaye aussi de lui apprendre ce que l'âge lui à enseigner. Bien entendu, le refus des plus jeunes à écouter leurs aînés est une fois de plus mis en avant. Il me semble qu'à aucun moment, Gambino a cherché à élever Guts au delà de ce qui pourrait lui être utile. Contrairement à Askeladd qui explique le cours de l'histoire à son jeune protégé, les flux des peuples qui remplacent les civilisations trop anciennes et faibles pour continuer à exister. Rappelons le aussi, mais jusqu'au siècle dernier, les enfants n'étaient pas considéré comme de futurs adultes, mais comme une force de travail, ou une bouche à nourrir. Gambino s'inscrit parfaitement dans ce registre la. Alors que je vois chez Askeladd une pointe de modernité, son désire de transmission pour que Thorfinn porte en lui des valeurs et des connaissances sensées faire de lui un homme plus sage.
Askeladd est donc bien plus qu'un super guerrier, un fin stratège, un fiéfé malin. C'est aussi un mentor. Il est le porteur d'un discours de sagesse dans ce monde chaotique. Il vit dans et par le chaos. Mais on ne peut pas construire la dessus. Il se met à croire en Knutt. Ce jeune prince trouillard, qui n'aime pas la guerre, qui a peur de parler en public. Il réussi par des truchements amoraux à éveiller en lui (potentiel qui était latent cependant) un véritable souverain. Knutt, ou encore Canutt, va chercher à donner un sens à toutes ces morts, à toutes ces guerres. Ce jeune homme qui se met à rêver d'un monde meilleur. C'est ce qu'Askeladd a recherché toute sa vie. Un homme qui donne un sens à sa propre vie.
N'est ce pas ce qu'on cherche tous? Que quelqu'un donne un sens à nos vies?
Lorsque le prince lui fait remarquer qu'Askeladd a le potentiel pour le faire, celui-ci lui répond qu'il ne peut pas parce qu'il n'est qu'un simple guerrier norrois. Askeladd a des rêves, mais il ne peut pas les réaliser car il a atteint son propre seuil de compétence, principe si cher au sociologue Peter. Pour les réaliser il a besoin que quelqu'un soit là pour incarner quelque chose de plus propre que sa vie de débauche et de piraterie. Il se hait pour ce qu'il est, mais ne peut y renoncer. Knutt lui permet d'effacer un temps tout son passif.
D'un autre côté, il est l'homme adéquat pour aider Knutt à atteindre son but. Puisque d'une certaine manière il le partage.
La relation de mentor avec Thorfinn est différente. Askeladd n'essaye pas de faire de lui un roi qui donnera un sens au chaos du monde. La relation entre Thorfinn et Askeladd est de celle faite pour apporter de l'ordre dans le chaos intérieur. Si de son vivant, Askeladd n'a pas réussi à diriger la haine de Thorfinn sur quelque chose de plus constructif, c'est après sa mort que son souvenir parvient à faire changer Thorfinn.
Des années se sont écoulées, Thorfinn n'est plus qu'une loque devenue esclave. Il ère dans sa propre vie sans but. Si des hommes comme Einar ou Vipère ont réussi à éveiller en lui quelque chose de nouveau, c'est le souvenir d'Askeladd qui lui fait prendre une toute nouvelle envergure. Celui-ci vient "le visiter" pendant que Thorfinn est évanoui. Les discours que Thorfinn refusait d'écouter plus jeune prennent enfin consistance. Et, sans dévoiler tous les ressors de l'oeuvre, il s'aperçoit qu'il ne haïe plus Askeladd. Ne dit-on pas que le temps efface tout?
Askeladd est véritablement un guide, le fil d'Ariane de Vinland Saga. Et ce, pas uniquement grâce à ses actions, mais surtout grâce à sa capacité à créer de l'ordre dans le chaos. En opposant Thorfinn et Knutt, on se retrouve avec de formes de chaos, l'un interne en chacun de nous, l'autre externe qui prend place dans le monde réel. Askeladd, ce gamin si terne, couvert de poussière est une étoile qui guide les âmes perdues.
Askeladd est ce qu'est Gandalf dans le seigneur des anneaux, ce qu'est Dumbledor dans Harry Potter, ce qu'est Obiwan à Luke... Ce sont des hommes qui poussent leurs protégés à se transcender, et à trouver leur voie dans la vie.
Pour tous ces guides qui s'échinent à nous montrer la route à prendre,
Pour tous ces guides qui ont besoin qu'on suive la route qu'ils nous désignent,
Pour faire place à l'ordre dans cet univers de chaos,
Pour que leur vie et aussi les notre aient un sens,
Votons ensemble pour
Askeladd.