PolisseSSof D Belge a écrit:
Et sur ce point, je pense qu'il est intéressant de faire un très léger lien avec le post d'ange bleu dans le topic "Chez les cinéphiles" sur l'interview de Maïwenn (Là ^_^). En effet, on sent que les acteurs possèdent une grande marge de liberté (il doit y avoir quelques scènes plus ou moins improvisées dans le film, à mon avis), peut-être qu'il ne sont pas dirigés magnifiquement, ni que leur écriture n'est pas ultra poussée, mais parce qu'ils racontent quelque chose de "vrai", des choses qui semblent naturelles au personnage comme à l'acteur, on y croit, et les acteurs se subliment, et subliment le film avec eux.
Le talent de la réalisatrice et des acteurs est de nous plonger dans l'équipe comme si on y était. On rit, on pleure (oui, ça va, j'ai lâché ma larmichette, pas de moqueries, ça arrive !), on ressent tout avec les personnages.
Je n’ai pas vu le film mais je me permets d’intervenir pour clarifier une chose et éviter tout malentendu sans pour autant polluer ton sujet ^_^
Tout d’abord ce que j’ai pointé lors de mon intervention est une certaine vision du cinéma et non le travail de Maïwenn en lui-même.
A noter qu’il y a une différence entre laisser à un acteur la possibilité d’improviser dans un cadre et le laisser à l’abandon, et donc le laisser faire n’importe quoi. Diriger des acteurs c’est également leur laisser la possibilité d’aller au bout de l’émotion de leur jeu. Bref diriger n’est pas castrer et dans tout film il y a toujours une part d’improvisation. Avoir un cadre ne veut pas dire être psychorigide mais c’est se donner les moyens d’atteindre son objectif ^_^
Ensuite j’ai bien aimé comme je l’ai dit
Le Bal des Actrices et à propos de ce « genre » de cinéma (absence de grammaire cinématographique) je trouve que Maïwenn est l’une qui s’en sort le mieux et cela pour une bonne raison que je vous donnerai à la fin ^_^
Mais avant cela j’aimerais revenir et développer rapidement ce qu’est exactement ce cinéma « sans grammaire cinématographique » dont certains réalisateurs français vantent le mérite et aiment y revendiquer leur appartenance parfois dans une position anti système/règle plus ou moins heureuse (Maïwenn ^_^).
Le cinéma « sans grammaire cinématographique » existe depuis que le cinéma existe. Il possède plusieurs noms mais on le reconnaît dans son argument d’existence. En effet étant pauvre d’un point de vue formel il lui faut pourtant tout de même attirer le public et pour cela il a toujours joué sur l’aspect racoleur et voyeur de ses sujets.
Ce cinéma que nous allons appeler ici Cinéma Bis (dénomination répandue et classique) couvre en réalité un périmètre bien plus large que ce qu’on peut imaginer dans un premier temps.
On peut en effet le diviser en deux catégories.
Tout d’abord ce que j’appellerai le Cinéma Bis Sensible qui compense sa pauvreté cinématographique en proposant du voyeurisme qui repose sur les sens - et pour dire les choses d’une façon simple et directe, qui propose aux spectateurs des fesses et du sang.
L’autre catégorie de Cinéma Bis est celui dit Social, qui propose donc un voyeurisme et un racolage dans le domaine social en mettant là aussi le spectateur dans une position de voyeur dans le sens où le propos et le déroulement sont trashs (au sens large j’entends). Un film comme le
Bal des Actrices relève de façon évidente du voyeurisme et du fantasme de découvrir sans détour les névroses et complexes que les actrices cachent.
Dans les deux cas ce type de Cinéma compense donc toujours ses lacunes grammaticales par un propos et un déroulement volontairement « trash », et cela dans le but de titiller le spectateur dans une zone qui se trouve soit en dehors, soit à la bordure, du « confort social » - bref cela relève d’une approche « sans concession » et d’une question morale. L'un peut être considéré comme non-intellectuel, l'autre comme intellectuel, mais en dehors de cette dictinction leur démarche formelle et leur rapport à la morale et au conventionniel est identique.
Evidemment ce type de motifs n’est pas propre au Cinéma Bis, mais c’est ce qui le définit proprement à travers cette volonté de refuser toute limite sensible ou sociale : je montre ce qui doit normalement rester cacher car dérangeant ou moralement limite/dur.
En France le Cinéma Bis Social est assez représenté et certains réalisateurs sont devenus des spécialistes de ce type de cinéma. Ces derniers aiment d’ailleurs l’appeler à l’occasion « Cinéma Vérité » lorsqu’ils sont dans un élan « auteuriste » et qu’on pointe du doigt leurs lacunes cinématographiques. Certains aimant même prendre des non-acteurs pour faire plus « vrai », même si le plus souvent (et logiquement) cela donne un résultat qui peut rapprocher de la performance des acteurs du Cinéma Bis Sensible aux interprétations souvent douteuses ^_^ Mais peu importe le but n’est pas la réussite formelle du film, c’est de titiller le spectateur et le conventionnel.
Une fois cela posé qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : à aucun moment je n’ai abordé la question de la « Qualité » du Cinéma Bis. J’aime beaucoup ce cinéma, il y a de tout et même de grands films et des classiques.
Les raisons pour qu’un film de Cinéma Bis ne se résume pas à un film « défouloir » pour spectateurs en mal de fesses/sang ou de crises sociales peuvent revêtir plusieurs formes. Néanmoins il y en a une classique assez répandue : des acteurs habités et épatants. Une excellente prestation d’acteurs a toujours le potentiel de sauver un film de sa pauvreté cinématographique.
Ainsi les réalisateurs de Cinéma Bis qui savent s’entourer de bons acteurs peuvent toujours s’en sortir et dépasser les limites de leur genre.
Pour revenir à Maïwenn ce qui fait sa force entre autres par rapport au réalisateur lambda de Cinéma Bis Social français c’est sa passion a priori sincère pour les acteurs. On peut lui reprocher beaucoup de choses, mais pas le fait de savoir s’entourer d’acteurs habités et épatants qui portent ses films.