Go go apocalypse !
(Synopsis)
Décembre 1992, la mégalopole de Tokyo est dévastée en quelques instants par une bombe nucléaire d’origine inconnue. Cette attaque sans précédent déclenche alors la Troisième Guerre Mondiale qui aboutira à la destruction par les armes nucléaires de toutes les plus grandes villes mondiales.
Trente ans plus tard, la mégalopole de Néo-Tokyo a été reconstruite, mais est par la même occasion une représentation de la décadence mondiale, un reflet bien sinistre de ce que sont les temps nouveaux. C’est dans cet univers que vit la bande de Kanéda, un groupe de jeunes délinquants drogués, désœuvrés et écœurés par le système.
Une nuit, l’un des membres du gang –passant le temps à faire des courses de motos nocturnes-, Tetsuo, est victime d’un curieux accident qui le met entre la vie et la mort. Un étrange enfant serait apparu sur la route et aurait déréglé la moto du jeune homme, le poussant à se crasher. Rapidement, les militaires arrivent sur place et l’embarque afin de le soigner ; Kanéda et le reste du groupe sont renvoyés chez eux.
Pendant que ces derniers retournent au camp de rééducation de Néo-Tokyo, Tetsuo est soumis à des tests qui révèlent en lui un potentiel intéressant pour les scientifiques de l’armée. S’évadant du centre médical, il réussit à revenir parmi ces amis, qui ne tardent pas à découvrir que les expériences qu’il subit le transforment peu à peu... Les progrès grandissant chez le sujet, les scientifiques l’ayant en charge ne tardent pas à évoquer à leur supérieur, le Colonel, la possibilité de voir un nouvel Akira surgir.
Parallèlement, des résistants, dont la jeune et fougueuse Kay, ont eu vent de ce mystérieux projet Akira, et cherchent à s’en emparer.
Champ, champ, champ, champignon !
This is a fuckin’ mess
(Personnages)
C’est indéniable, Akira est doté d’un scénario assez fou et génial pour être de prime intéressant, mais cela ne fait heureusement pas tout. En effet, si ce manga est devenu aussi culte, c’est grâce notamment à une galerie de personnages attachants, rarement plats, et capables de revenir à la charge dans le scénario à des moments où on les avait oubliés.
Shotaro Kanéda
Kanéda est le chef d’un groupe de délinquants largués par la société et ne disposant que d’eux-mêmes pour survivre. S’il a l’allure d’un petit caïd, on peut noter que c’est un lâche parfait ne servant que ces intérêts et n’étant jamais au bon endroit au bon moment. Malgré tout, son statut de leader n’est pas usurpé puisqu’il entretient des liens très étroits avec ces compagnons, qu’il n’hésite pas à défendre en mettant sa vie en jeu. C’est pour cela que Kanéda peut aussi être défini comme un cocu magistral, réussissant à se dépêtrer de situations très périlleuses, généralement par une chance monstrueuse.
Vantard sur les bords, il aime faire valoir son sex-appeal sur toutes les jolies filles qu’il rencontre, ce qui lui vaut de se prendre souvent des coups dans les parties sensibles, notamment par Kay qui ne supporte pas ses dragues lourdes et grotesques.
Tetsuo Shima
Tetsuo a toujours été le second, jamais premier, avec une enfance très difficile puisqu’il n’a pas connu ces parents. En mal d’amour, Tetsuo a eu du mal à se faire des amis, ce qui ne l’a pas empêché de se lier d’amitié avec Kanéda et de devenir son bras droit. Manquant cruellement de confiance, le jeune homme est d’une nature très timide et a du mal à s’affirmer.
Toutefois, les expériences menées sur lui par les militaires vont faire apparaître en lui un potentiel insoupçonné de sa part, au-delà du réel. Peu à peu, cet adolescent perturbé et renfermé va se remettre en question, et par là changer radicalement, prenant de l’assurance et devenant un leader improbable.
Dire que Tetsuo est le meilleur personnage d’Akira est un euphémisme, puisque je le considère moi-même comme le plus grand méchant du manga, à la fois surpuissant et faible, dépendant de la drogue et idéologiquement positionné. Un méchant qui n'est pas culte dans l'immédiat, mais qui s'impose dans la durée, qui évolue profondement pendant le manga, qui n'est pas fixe. Tetsuo laisse des traces à quiconque lit Akira et ne rend personne indifférent, c’est indéniable. Capable du meilleur comme du pire, cet homme représente bien l’ambiguïté humaine, et à sa façon le surhomme présent en chacun de nous.
Kay
Résistante dans un groupe idéaliste démocratique clandestin, elle cherche avec ces camarades à dévoiler à la population les expérimentations militaires secrètes. Caractérielle, elle se laisse rarement marcher sur les pieds et est prête à tout pour réussir sa mission, et ce malgré son jeune âge. Elle se croit amoureuse de l’homme qui dirige le groupe, Ryû, et n’hésite pas à rejeter violement les avances de Kanéda, quelques soient les circonstances dans lesquelles il les fait, ce qui ne manque pas de les mettre toujours en danger. Elle peut heureusement compter sur la chance de cocu de ce dernier pour se sortir de tous les pétrins dans lesquels elle se retrouve généralement embarquer.
Le Colonel
Militaire de formation, il est aussi le seul à connaître le projet Akira et à en mesurer l’ampleur. De là, il vouera toute sa vie à éviter les catastrophes pouvant être engendrées par Tetsuo, le numéro 41, et le mystérieux numéro 28, Akira. Fidèle jusqu’au bout à ce principe, le Colonel est un homme de parole, porté par une philanthropie qui le pousse à essayer de sauver le plus de vies possibles au mépris de la sienne.
Lady Miyako
Cette mystérieuse vieille femme aux allures de divinité bouddhiste est la seule rescapée du l’expérimentation du programme militaire qui a fait naître le projet Akira, dont elle garde les secrets pour elle. Portant le numéro 19, elle s’efforce de veiller par l’intermédiaire du politicien Nezu les agissements des militaires pour empêcher toute nouvelle catastrophe.
Chiyoko
Armurière du groupe clandestin dont Ryû et Kay font partis, elle est la meilleure amie de cette dernière. Physiquement très robuste, elle ne fait généralement pas dans la dentelle et n’hésite pas à faire parler la poudre pour se sortir de situations périlleuses dont elle réchappe toujours non pas grâce à une chance légendaire kanédienne (qui lui ferait plutôt défaut) mais grâce à son expérience du terrain. Vétéran du combat, elle n’éprouve aucune pitié pour ces adversaires, qui finissent le plus souvent impitoyablement tués par ses soins.
Akira
Qui est-il ? Que veut-il ? Quel est son passé ? Pourquoi est-il aux mains des militaires qui le tiennent dans le plus grand des secrets ?
It’s legen... wait for it... dary!
(Avis)
Voilà une brève présentation de ce qu’est ce monument du manga moderne appelé Akira, qui, vous le comprenez, possède bien d’autres atouts, mais qui sont plus délectables à découvrir par soi-même.
Car si Akira réussit tant à nous fasciner encore aujourd’hui, c’est aussi parce que Katsuhiro Otomo a une façon bien particulière de raconter l’histoire, d’arrêter l’action sur certains points afin de nous faire parvenir une impression de puissance autrement plus grande que ne le peut un bodybuildé Sangoku détruisant six planètes avec une attaque (argh, leveling tu m’as tué). C’est surtout lors des derniers tomes, et je pense ici à la fameuse attaque des porte-avions américains, qui sont sublimes de ce point de vue, assez long dans l’ensemble, il n’en demeure pas moins une démonstration exaltante et inégalable de puissance et de destruction. Une réussite.
Le fait d’avoir réussi à mettre le scénario au service des personnages est un véritable coup de maître de la part d’Otomo, qui ne nous transmet pas les pérégrinations de coquilles vides et dépourvus d’âmes ; ils les dotent au contraire d’un fort potentiel qu’il pousse dans ces retranchements.
De ce que j’ai lu du manga, je n’ai pas souvenance d’une œuvre antérieure à Akira qui est aussi marquée par l’anti-manichéisme, nous montrant un héros aussi peu courageux et philanthrope ; et un méchant aussi touchant et émouvant.
Akira est, enfin, une œuvre à réflexion, métaphysique par instant, sur la puissance des hommes (sublimé ici par la confrontation permanente entre Kanéda et Tetsuo) et leur place dans les forces naturelles, dépeignant des hommes dans ce qu’ils ont de plus minable, de plus bas, de plus violent, mais aussi de plus touchant ; en définitif de plus vrai.
Akira se ressent plus que ne s’explique. C’est quelque chose qui, avant tout, se lit. (C’est d’ailleurs sans doute la raison de l’absence de topic concernant le manga jusqu’à lors).
Une claque éternelle, indémodable, universelle et merveilleuse.