Directement et sans vergogne aucune – jamais –, je vote Tetsuo ! Au lieu de justifier mon choix, je vais plutôt justifier mon non-choix de Gokû. Parce que Tetsuo est de toute évidence – et comme l’a murmuré Leto II à vos oreilles écarlates – un personnage dont la flamme brûle à travers les pages, au-delà des pages, par delà le simple cadre du manga, dépassant l’horizon lointaine de la ligne fictive de la fiction narrée. Il vit ; et c’est là son meilleur argument.
A Gokû, je lui préfère Luffy, à cent lieux même, à des distances incommunicables encore, et déjà plus culte, bien plus culte et profond, car plus vivant, plus affable, plus drôle – notons-le –, plus unique et enfin plus éclatant, telle une éclisse lunaire et solaire tout à la fois. Imprononçable écart ! Si Dragon Ball est culte – et pour moi et pour les autres – c’est avant tout pour son aura d’ensemble, pour sa créativité d’alors, pour son audace tout à fait, même, dirais-je, pour ce qu’il a osé transposer de la légendaire légende du Roi des Singes. Mais hélas ! pas pour Gokû en soi. Bien sûr, il joue son rôle, mais un rôle minime quand même devant la grandeur qu’a inspirée l’œuvre entière. Le père de Gohan représente une génération de personnages, types dans leur conception, instauration d’un certain système, mais ce n’est pas tant pour Gokû en lui-même, simplement pour les idées a posteriori qu’il a pu insuffler. Il est délirant, puissant, attachant, touchant mais il n’est pas transcendant : son problème est là. Parce qu’un héros transcendant transcende précisément le temps, et de naguère à aujourd’hui, il reste, il demeure le seul, l’unique être supérieur de sa caste, que même les plus vives dérives stochastiques ne pourraient jamais ébranler. Or – et c’est le malaise –, de nos jours, nouveaux et nouveaux encore, bon nombre ont surpassé l’avatar d’origine, l’ont tué à coups d’estocade prompts et violents. Voyez ! Gokû reste dans nos cœurs car il est l’Adam de son clan, non car il en est la digne quintessence.
Votez Tetsuo, et vous aurez sauvé votre journée !
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