hiken no e2 a écrit:
Emissamdeus a écrit:
En fait, je n'ai cité que les cas me paraissant crédible. mais il y a effectivement une liste assez gigantesque de concordances clairement tirées par les cheveux. Et les fans ne cessent d'en trouver de nouvelles en étirant au maximum les calculs dans tout les sens. Celles-là, je ne les ai pas citées parce que c'est très improbables qu'elles soient volontaire de la part d'Oda.
Mais les "célèbres" en revanche ne sont pas qu'un délire. je ne vois pas comment pourraient être un hasard les apparition du G4 qui sont systématiquement une inversion des chiffres de chapitre de power up précédents. 1 fois peut être, autant de fois non.
Tes exemples m'ont presque tous convaincu sauf un seul (le numéro 4), il me parais évident que Oda met en place ce petit jeu avec les numéros de chapitre (ça explique d'ailleurs les rallonges inutiles parfois, afin de faire coïncider sûrement)
C’est très problématique à mes yeux de penser ça et ça illustre exactement ce que je voulais désigner par errements de la numérologie.
En raisonnant ainsi, on substitue une logique symbolique anecdotique (correspondance de chiffres, pour créer des liens artificiels) à la logique principale qui est la dynamique narrative (le propos qu'on raconte). Aucun auteur n’écrit en se disant « je vais rallonger ce développement pour créer dans quelques chapitres un lien numérique avec un développement antérieur vaguement proche, pour quelques amateurs de décodage hermétique peut-être le décèlent ». Ou alors de très mauvais auteurs. Et croire cela, c’est très embêtant je pense.
Un auteur cherche avant tout à raconter une bonne histoire, et se donne les moyens de cela, parce qu’il pense d’abord à construire l’enchainement des événements de son récit. Considérer qu’Oda a pu rallonger son histoire pour des affaires de chiffres, c’est le considérer comme un mauvais auteur, et croire qu’il nous prend pour des truffes, nous les lecteurs. One Piece n’aurait pas le succès qu’il a si c’était le cas. Et personnellement, si j’étais convaincu qu’Oda étire son récit pour faire correspondre les numéros de chapitres autour de techniques du héros, ben j’arrêterai tout de suite de lire One Piece car ce serait évident pour moi que je perdrais mon temps avec une œuvre mineure (quel intérêt, sérieusement, de s’embêter à faire ça ? Surtout au détriment du plaisir du lecteur, souci premier d’Oda comme il ne cesse de le répéter ? En quoi serait-ce le signe d’une quelconque grandeur artistique ?)
Qu’il y ait parfois des convergences, des clins d’œil, des coïncidences, bien sûr. Mais il ne faut pas inverser l’importance des logiques et c’est ça le défaut que je pointe, et que tu pressens, hiken no e2, lorsque tu évoques des abus. Après, Emissamdeus amalgame des cas de figure qui relèvent de régimes très différents, ce qui entretient une forme de confusion. Si on veut être rigoureux, pour moi, ça donnerait ça :
- Chapitres centenaires. En plein dans le biais de confirmation qu’EnOd rappelle à juste titre. Quand on veut absolument trouver quelque chose, on le trouvera. C’est une erreur logique hyper connue mais dont il faut impérativement se méfier, et qui tourne à plein dans l’argumentation numérologique. Pour les chapitres centenaires, la bonne démarche est de voir ce qu’ils offrent, et si ça fait sens différemment des autres chapitres. Et si on est objectif, on est loin du signifiant systématique (
j’en parlais déjà là. Ce qu’on sait, c’est que pour le chapitre 100 Oda l’a voulu comme signifiant en tant que
seuil. On passe la centaine de chapitre, on passe à une autre partie du voyage. Mais cet effet de seuil ne se retrouve presque jamais dans les autres chapitres de centaine, alors même qu’il s’observe dans nombre d’autres chapitres. On vient encore d’en avoir la confirmation là avec le 900, prophétisé comme fin de l’arc, et pas du tout en fait. Donc oui, on peut trouver des choses importantes dans les chapitres centenaires, mais qui font sens de manière systémique, non, ce n’est pas le cas; de même qu’on peut trouver des choses importantes dans à peu près tous les chapitres de l’œuvre.
- Les systèmes d’inversion de chiffres dans les chapitres soi-disant signifiants: biais de confirmation encore, mais de manière ouverte. On ne retient que ce qu’on veut bien pour les besoins de la démonstration et on va piocher de manière très large dans l'ensemble du corpus. One Piece est une œuvre fleuve, et riche. On trouvera toujours des échos et rapprochements dès qu’on en cherchera. C’est exactement ce qui est dénoncé dans le film que tu évoques hiken no e2, et ce que déjà dénonçait Umberto Eco dans
Le Pendule de Foucault (à lire impérativement avant de commencer à s’enfoncer dans ce genre de théorie à base de numérologie,
mais j’en avais déjà parlé il y a quelques temps). Le problème, c’est de chercher mordicus des éléments signifiants là où c’est impossible de vérifier s’ils existent.
- Les jeux autour des nombres à l’intérieur des images ou du texte : les chiffres sont utilisés par Oda comme marqueurs de ses personnages, on le sait bien, comme ce qui tourne autour du go/5 pour Luffy. C’est explicite et affiché, à l’intérieur de la diégèse (dans l’histoire), et pas en dehors (numérotation). Mais justement, il y a un jeu accessible et ouvert de l’auteur avec ses lecteurs. On est très loin des élucubrations qui demeurent sur des numéros de chapitres ou qui partent dans des calculs auxquels on peut faire dire ce qu’on veut.
Faire attention à cela est important pour moi à plusieurs titres :
- d’abord parce qu’ainsi on peut davantage faire attention à ce qui fait sens réellement dans l’œuvre (sa logique narrative, ce que ça raconte)
- ensuite par qu’on échappe à un régime qui repose sur la croyance et le mystère pour s’ancrer dans un autre régime, du côté de la réflexion critique. Et le mieux pour commencer, outre bien prendre la mesure de ce qu'est le biais de confirmation,
c’est sans doute d’aller faire un tour du côté de la zététique, et de voir comment dans une argumentation qui se prétend "scientifique", dès lors qu’on ne cherche pas à l’inscrire dans un cadre de possible réfutation (
principe de Popper), ben ça pose problème.
- ce qui nous sort du cadre de One Piece : la numérologie, c’est problématique aussi parce que c’est le type de logique sur lequel se déploie toutes les théories type théories du complot, qui reposent presque systématiquement sur le biais de confirmation. Cette semaine, j’ai présenté L’Homme de Vitruve à mes étudiants, et pour beaucoup, c’était les Illuminati, avec des questions sérieuses sur le mode « mais ils existent, bien, non, les illuminatis ? ». C’est quand même très embêtant. Et ça nous rappelle qu'il faut lutter contre la fascination qu'on peut avoir vis-à-vis de ce qui fait appel à notre crédulité.
Après, maintenant que les données ont été présentées, chacun peut se faire son opinion, de croire, ou non, à ce qui relève des liens numérologiques entre les chapitres de One Piece.