ange bleu a écrit:
Je suis désolé si je t'ai vexé mais je pense que tu vas trop vite en besogne, surtout en balayant de la main ce qui a été annoncé par l'auteur lui-même, annonce qui est en concordance avec les thèmes classiques de la Légende Arthurienne.
Pour moi, le sujet de réflexion ce sont les modalités de cette séparation et je n'exclus rien, comme la persistance de certaines communautés.
Je pense que notre différent n'est pas causé par une question de vision de l'oeuvre, mais de l'auteur. Je pense que Suzuki est plutôt bon et j'aime bien ce qu'il fait, mais ça s'arrête là; j'avais énormément de critiques pour NNT (surtout vers la fin). Donc, je ne balaie rien, je suis tout simplement beaucoup plus sceptique sur sa capacité à mener à bien son projet artistique, c'est pourquoi je tends vers des théories qui n'excluent absolument pas la possibilité qu'il soit en train de se foirer sur son propos. Ce qui peut arriver, même aux meilleurs (je pense par exemple à Naruto, dont l'un des thèmes de départ est la supériorité du travail acharné sur le talent, alors que si on regarde dans les faits, le héros, Naruto, est élu jusqu'au trognon, le fruit de prophétie sur prophétie et de l'alliance d'au moins quatorze lignées prestigieuses).
J'aurais peut-être tort et la fin coulera de source, mais ça, seul l'avenir nous le dira.
ange bleu a écrit:
Ce que tu dis sur les couples mixtes des héros rappellent là aussi l’œuvre de Tolkien. Les héros de ce dernier, qui sont généralement des rois, ont épousé à quelques reprises des elfes, mais cela n'a pas donné un monde mélangé si je peux dire. Là dans 7DS, c'est un peu la même chose, ce sont des souverains qui ont fait des mariages inter-tribus. Mais j'ai une lecture médiévale de ces événements, comme chez Tolkien. Ces mariages permettent de sceller des amitiés, voire des alliances, comme au temps de nos propres rois quand on mariait le dauphin à une princesse autrichienne : cela donnait naissance à une alliance pour éviter la guerre.
Bref, de mon côté je prends au sérieux l'annone de la séparation des mondes et je réfléchis à la forme qu'elle pourrait prendre. De plus de façon générale, j'ai une vision médiévale de la géopolitique de Britannia, mais je peux me tromper^^
Sur ce point, je suis obligé de te reprendre, car ton analyse occulte l'aspect fondamentalement mythologique de l'écriture de Tolkien, qui est à l'origine de la création de la Terre du Milieu. L'un des buts de sa vie était la reconstruction de mythologie perdue de l'Angleterre (c.f le fameux problème des sources quand on aborde la mythologie celtique). Ses alliances sont donc plus proches des couples entre divinités et mortels qu'on retrouve dans diverses mythologies que des mariages aristocratiques. Cependant, une des caractéristiques propres à l'oeuvre de Tolkien, du fait de ses influences chrétiennes, est il ne peut y avoir de mélange entre les Humains et les autres races, en raison de la nature ontologiquement différente de la race des Hommes. Possédant le Don d'Illuvatar, leurs âmes ne sont pas liées à Arda, libres de construire leur vie au-delà de la Musique des Ainurs. De fait, les demi-Elfes de Tolkien ne peuvent pas exister comme race à part entière: ils doivent choisir leur nature, entre conserver leur immortalité et leur lien au monde, et la sacrifier pour la mortalité et la liberté des Hommes.
Tout cela est absent chez Suzuki. En théorie, le mythe de la Création fait écho à cela, avec une différence de nature entre les races, les Humains étant les favoris du Chaos. Or, cela ne se retrouve pas dans les faits, parce que Suzuki n'est pas un auteur particulièrement cohérent. Par exemple, les Humains sont sensés être spéciaux car ils ont à la fois le mal et le bien en eux, ce qui ferait sens dans un univers comme DnD, où les créatures magiques sont souvent prisonnières de leur nature (un démon de l'Abysse est incapable de vraiment aimer, car sa nature est fondamentalement cruelle et chaotique). Dans NNT par contre ça n'a pas empêché des Déesses d'être des crevures sans nom et des Démons d'être sympathiques et aimants. En outre, les mélanges sont parfaitement possibles et les rejetons semblent posséder les caractéristiques des deux parents, donc pas de différence ontologique entre les races.