Après un effort considérable parce que j'ai dû réécrire en intégralité le chapitre 17, puisque le premier jet ne m'avait plus donné satisfaction... Après un temps record de plus de 15 heures passées à taper sur un clavier d'ordi comme un autiste pour finaliser ce même chapitre 17... Après enfin, quinze relectures dûe à la longueur encore une fois record de ce toujours même chapitre 17, j'ai l'honneur de vous annoncer qu'il est là ! ^^ Bon, en fait là, ce que je veux réellement vous dire, c'est que ce chapitre ben, euh... j'espère que vous m'en voudrez pas trop parce que si vous attendiez la suite de la confrontation Vaunh/Leozui ou encore Amy/Luna... j'vous ai bien eu !!!
Eh ouais, nouveau flashback sur Amy (c'est d'ailleurs pour ça que la première version de ce chapitre avait été écrite il y a deux mois - je devais en effet d'abord avoir imaginé le passé de ma musicienne avant d'attaquer l'histoire de son intégration ou encore avant d'introduire Luna dans ma fiction ^^) !!
Je sais que Le Chasseur avait à un moment donné "Amy" (jeu de mot powaaa) le souhait d'en savoir plus sur la relation Amy/L'ancien maître d'Amy, eh ben il va être servi !! ^^
En bref, bonne lecture (j'espère parce que j'ai jamais autant bossé un chapitre - bien que je n'en suis toujours pas content à 100% mais là, vraiment plus envie de me le retaper une troisième fois XD !).
「Chapter Seventeen: Edge Of The Ocean」
「Flashback: Seven years ago」
Une joyeuse contrée, symbole de la festivité la plus démesurée, berceau de Dionysos et point de départ de l’art noble et exquis appelé musique, voilà ce qu’était Comodo… D’un commun accord, le monde entier l’avait élue comme étant le lieu où l’on pouvait rencontrer le plus grand nombre de talents et autres prodiges, princes ou princesses des notes. Située dans la première partie de Grandline, cette île avait une étrange forme de clef de sol et était souvent qualifiée de « ville à échelle humaine » pour le simple fait que l’on pouvait en faire le tour sans autre moyen de transport que celui que nous avait gentiment fourni la nature. De curieux arbres ayant l’apparence de diverses notes de musique peuplaient avec élégance et non moins délicatesse l’ensemble de l’endroit, créant des zones d’ombre et de lumière de toute beauté. Une superbe plage, teintée d’un orange mécanique mais sobre, était accessible de tous temps au public et c’était là, au bord de l’océan, que se montaient les plus grands concerts que le monde était en mesure d’accueillir… D’ailleurs, fait intéressant de la culture locale, cette plage était constamment et artificiellement maintenue hors des rayons du soleil car de jour comme de nuit, on souhaitait pouvoir créer une ambiance féérique, enluminée de mille couleurs scintillantes…
Une maison biscornue, dont le reflet sur la rétine se passait de tout commentaire superflu, était perchée sur l’unique colline de l’île. Entourée d’un magnifique jardin, embelli par une très grande variété de fleurs allant du lilas au pélargonium gibbosum, en passant par le bégonia gigantea ou encore la sauge leucantha, elle était habitée par une joyeuse famille nommée Kahelia. Les nuages avaient daigné être cléments ce jour-là, ils n’avaient pas décidé de poser leur sombre éclat sur cette province verdoyante, faisant par là même le bonheur de tous les habitants et autres gens de passage. C’était sous ce décor de rêve, sous ce ciel d’un bleu naturel et représentatif de la mer, qu’une des périodes les plus ténébreuses de celle qui allait devenir bien plus tard la musicienne de bord de l’équipage de Luffy, allait commencer…
- Papa, maman, je suis rentrée ! appela une petite fille à la voix candide.
La fillette qui venait de passer le pas de la porte n’était autre qu’Amy. Elle avait alors dix ans et vivait très heureuse à son domicile familial. Elle était toute petite et n’avait pas encore les cheveux aussi longs qu’elle ne les avait à présent. Elle était habillée d’une petite robe rose et sa minuscule frimousse était une source de bonheur pour ses parents.
Devant elle se présentait un petit couloir étroit qui menait au salon de la maison. Juste à sa droite, après l’entrée, se trouvait une petite cuisine alors qu’à sa gauche un escalier se dressait dignement, elle menait à l’étage supérieur où on pouvait accéder aux chambres de la famille. Ses parents, quant à eux, étaient tranquillement assis dans le séjour et pour les rejoindre, Amy courut donc à toute vitesse vers eux. Sa mère était une très belle femme d’une trentaine d’années. Elle portait un ruban blanc dans ses longs cheveux éclatants et avait des yeux d’un magnifique bleu azur. Elle était vêtue également d’un petit T-shirt ainsi que d’un jean, lui arrivant légèrement au dessus de la cheville.
En ce qui concernait son père, il devait avoir à peu près le même âge que sa femme et arborait à merveille une barbe mal rasée. Ses cheveux noirs lui retombaient sur le front et c’était d’ailleurs là un sujet de dispute assez récurrent pour le couple, car la mère d’Amy ne supportait pas la coiffure de son mari. Celui-ci était habillé d’une grande veste noire ainsi que d’un pantalon bleu nuit. Ils avaient tous les deux l’air d’aimer profondément leur fille.
- Alors, ce cours de flûte traversière ? Tout s’est bien passé ? demanda avec douceur la jeune femme, regardant affectueusement la petite fille qui venait d’arriver.
- Oui ! J’ai encore appris plein de trucs géniaux aujourd’hui ! se réjouit Amy, l’air radieuse.
- Vaut mieux, intervint son père. Au prix où on paye ce professeur de malheur…
A ces mots, sa femme se dirigea vers lui d’un pas inquiétant qui résonnait sombrement sur le pallier de la demeure et dans une rotation du corps, elle lui porta un coup de poing extrêmement violent sur la tête. Sawyer, puisque c’était ainsi que se prénommait celui qui venait de se prendre une rouste monumentale, eut alors les yeux en spirale tandis que de la bave immonde lui sortait de la bouche. C’était indéniable, il était KO.
- BEEEUUH !!... Une tornade s’est abattue sur ton père, Amy… Enterre-moi dans un vaste océan, s’il te plait ! Je sens déjà mon âme quitter mon frêle corps… gémit Sawyer avec des toussotements improvisés et sur un ton faiblard.
- SI ON TE MET DANS L’EAU, ON PEUT PLUS APPELER ÇA UN ENTERREMENT, TRIPLE ANDOUILLE !! martela Nausicaa, la mère de la future musicienne.
- HEY ! SANS-CŒUR !! TU TUES ET APRES TU CRIES SUR TA PAUVRE VICTIME ?! répliqua Sawyer, d’un air boudeur.
- JE NE T’AI PAS TUE !! SINON TU NE POURRAIS PLUS PARLER ! vociféra Nausicaa, littéralement en train de bouillir.
- QU’EST-CE QUE T’EN SAIS TOI, D’ABORD ? T’AS PAS DEJA ETE MORTE QUE JE SACHE !!
- PARCE QUE TOI, T’EN AS DEJA FAIT L’EXPERIENCE PEUT-ETRE ?
- PARFAITEMENT !! TU M’AS DEJA TUE 32459 FOIS !
Il pointa alors un index devant son visage et, voyant que sa pique exaspérait sa destinataire plus qu’autre chose, l’agita furieusement tout en ajoutant d’une façon mélodieuse :
- Et ne nie paaaaaaaas !! j’ai comptéééééééé !!...
Dépassée, Nausicaa décocha un nouveau coup à l’adresse de son mari, lequel vola à travers la pièce pour casser une fenêtre et échouer quelques mètres plus loin, sur une impeccable pelouse ! Tout ceci s’était passé sous les rires d’Amy qui aimait beaucoup se moquer des bêtises de son père.
- 32460 !!! ESPECE DE… SERIAL KILLER !! tempêta Sawyer, dont la voix semblait provenir d’un lointain inaccessible.
- Papa !! J’ai faiiiiiiiim ! se plaignit brusquement Amy, son ventre émettant le bruit caractéristique du vide immaculé.
- ATTENDS !! PAPA RESSUSCITE POUR LA 32460EME FOIS ET IL ARRIVE !!
Un petit silence s’ensuivit, puis :
- MODE REPARATION ON !!... YEAH !! PAPA EST REPARE !! répondit Sawyer qui repassa par la fenêtre fracassée pour se retrouver en compagnie de sa famille.
- Mais quel imbécile… murmura Nausicaa, une petite boule de fumée noire au dessus de la tête.
- Moi, je le trouve super marrant ! rectifia la fillette, les yeux en croissant de lune.
- Ahahahah !! T’as vu ça ? Ma fille m’adore ! lança-t-il dans un mouvement à tout le moins théâtral.
- C’est parce qu’elle n’est pas encore assez grande pour comprendre que t’es complètement débile ! souffla Nausicaa, visiblement prête à abandonner le débat stérile.
- C’est pas vrai, maman, je suis déjà vachement grande… Mais avant ça, j’ai faiiiim !! contesta Amy.
Voyant qu’elle ne pouvait pas attendre plus avant de caler son petit creux, Sawyer se dirigea vers la cuisine et revint quelques instants après, une bonne vingtaine d’assiettes dans les bras. Dans un son de quincaillerie, il les disposa toutes sur la table avant de s’asseoir et de s’attabler, tout à son aise. Ainsi, il commença à s’empiffrer de divers mets, prenant un plaisir pour le moins particulier et non insidieux.
- Aaah… ça va un peu mieux… marmonna Amy, se tenant son abdomen, affichant une expression de soulagement.
- Ahlala… Depuis qu’elle a entendu la chanson « La vie par procuration » de Jean-Jacques Goldman, elle s’arrange pour laisser les autres tout faire… soupira sa mère, comme si elle se parlait à elle-même et se passant une main dans ses cheveux.
- Parce que c’est trop la classe !! s’écria Amy, revigorée par le succulent repas de son père et une myriade d’étoiles se promenant à ses côtés.
- Ah oui ? Si tu continues comme ça, tu vas finir par mourir de faim et c’est tout ce que tu auras gagné…
Mais la jeune fillette n’écoutait déjà plus sa mère et se tournant vers Sawyer, elle lui lança un regard de reproche atroce, après quoi, elle s’étouffa exagérément :
- PAPA !! TU MANGES DE LA VIANDE !! TU SAIS POURTANT QUE JE SUIS VEGETARIENNE !
- Aaaah… Désolé… J’ai pas fait attention… haleta Sawyer, des sueurs froides lui coulant en cascade sur ses joues.
- C’est franchement dégueulasse !... Allez, recrache maintenant, je peux pas digérer de la viande ! décréta Amy, une main levée en signe d’encouragement, des petits points roses ayant fait leur apparition de part et d’autre de son visage.
- HEIN ?! T’ES PAS SERIEUSE SUR CE COUP LA, DIS ?! brailla le jeune père de famille, effrayé par la perspective imposée par sa despotique fille et les yeux en dehors de leurs orbites, un filet de morve lui pendant sous le nez.
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- Amy, aujourd’hui, tu devras te tenir à carreaux, d’accord ? Nous avons invité ton professeur Wilhelm à dîner, lui expliqua son père, un œil plus gros que l’autre et les sourcils remontés.
- Oui papa… Tu me l’as déjà répété cent fois… Tu deviens sénile ! répliqua Amy, un regard maléfique pétillant dans ses petits yeux.
Sawyer courut alors après la petite fille et l’attrapa avant qu’elle n’ait le temps de s’enfuir. Ils se trouvaient dans le salon de leur maison. Un fauteuil trônait au centre de la pièce alors qu’à droite se dressait une grande bibliothèque. A gauche, il y avait une gigantesque table où des plats avaient déjà été entreposés. Enfin, en face de la cheminée, qui se trouvait au fond de la salle, on pouvait observer la présence d’une jolie petite table basse aux motifs anciens, joliment ornée de perles transparentes.
Sawyer chatouilla Amy de bon cœur, laquelle se mit à rire bruyamment. Ils s’écroulèrent alors tous deux dans le fauteuil et continuèrent à se bagarrer le plus sainement du monde.
- Je vais t’apprendre à insulter ton père de sénile moi, petite chipie ! s’exclama-t-il, tout en continuant de chatouiller sa fille de plus belle, un éclair dans son regard.
- AAAAAH !! AU SECOURS !! Y’a un ogre qui veut me manger ! s’écria Amy, la larme à l’œil mais toujours le sourire aux lèvres.
A ce moment là, sa mère entra à son tour dans le séjour avec dans chacune de ses mains, des plats différents. Elle posa les assiettes sur la table et soupira profondément en voyant son mari et sa fille se chamailler l’un l’autre.
- Dîtes les enfants, ça ne vous a jamais effleuré l’esprit que je pouvais avoir besoin d’aide en cuisine ?...
Mais voyant qu’elle n’obtenait pas de réponse, elle reprit :
- ET REGARDEZ-MOI QUAND JE VOUS PARLE ! cria-t-elle en lançant un œil mauvais dans leur direction en même temps que deux tasses de thé chauffées à blanc.
- Nausicaa, aide-moi à corriger cette gamine… Elle m’a traité de sénile ! implora Sawyer en pouffant de rire, tout en esquivant le projectile qui le visait.
- Non, maman ! C’est moi qu’il faut aider, papa est en train de m’étouffer, il est méchant ! dit Amy, prenant l’air de bouder, elle aussi évitant la tasse qui lui était destinée.
- Vous êtes ridicules, tous les deux. Allez donc vous laver les mains, le professeur Wilhelm ne va plus tarder à présent, murmura la jeune femme, excédée.
A ces mots, père et fille arrêtèrent immédiatement de se quereller et dans un bruit tapageur, ils s’élancèrent en même temps et à toute hâte en direction de la cuisine. Mais le petit couloir n’étant pas assez grand pour que deux personnes, même de petite taille, puissent passer, Amy asséna un petit coup de pied à son père qui fut dès lors hors d’état de nuire !
- Aaaah… Ma fille n’a plus aucun respect de la hiérarchie… Elle devient comme sa furie de mère… balbutia-t-il, le souffle court et l’expression plaintive.
Là-dessus, Nausicaa s’avança vers son mari, lui lança un regard assassin du haut de toute sa grandeur et rugit :
- QUI C’EST QUE T’AS TRAITE DE FURIE ?!
- Heiiiiiiin ?! Ah mais personne, j’ai traité personne de furie !!...
- Si, si, je t’ai bien entendu, tu m’as traité de furie…
- Heiiiiiiin ?! Aaah ça ?... Mais non, je parlais pas de toi… Ah non, non, non, non, non !! Je parlais de la mer, voyons ! Tu sais, l’eau, la plage et tout ça ! J’ai dit : « sa furie de mer » !!...
- Ah mais c’est bien sûr !... fit Nausicaa, sur un ton ironique.
- Hey, hey ! Te fâche pas, hein ?
- Que je ne me fâche pas ?... répéta la jeune femme, après un petit silence.
- C’est pas possible ?...
- Bon, d’accord, je ne vais pas m’énerver…
- C’est vrai ?!
- Oui, oui.
- Ouuuf… En tout cas, sa mère, c’est pas une mère à voir… pour sûr ! se risqua-t-il de commenter.
- T’AS DIT QUOI LA ?! JE T’AI ENCORE ENTENDU…
- Heiiiiiiin ?! Mais non !... J’ai dit que c’était pas « une mer à boire » ! Comme la mer est en furie, c’est pas la mer à boire !!... bredouilla Sawyer, plus mal à l’aise que jamais.
- Bon, d’accord, je te pardonne de tes infamies, concéda Nausicaa, s’éloignant de son mari, lequel essuya frénétiquement la sueur qui s’était accumulée sur son corps entier.
Mais soudain, un nouveau projectile fusa à pleine vitesse en direction du père de famille et sans que celui-ci n’ait le temps d’esquisser le moindre geste, il le reçut de plein fouet et tomba à la renverse, sombrant dans le monde des songes, les yeux en spirale.
- Attaque surprise ! Le bouchon de champagne express !! sourit Nausicaa, la terreur se reflétant sur son personnage, tenant à la main une bouteille dont une fine vapeur s’échappait de l’embouchure.
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Un peu plus tard, on frappa à la porte et c’était Amy qui alla ouvrir. C’est alors qu’un homme d’une quarantaine d’années s’éleva devant la petite fille. Il portait un petit béret troué, un pull gris tout crasseux et un pantalon également gris qui semblait avoir fait son temps. Sur son visage, on pouvait remarquer qu’une petite cicatrice lui fendait l’œil gauche en deux. Enfin, il portait une petite moustache noire, qu’il entretenait, on pouvait le croire à sa vue, d’une manière remarquable.
- Professeur Wilhelm !! s’écria Amy, en se jetant dans les bras de l’homme qui se tenait devant elle.
Cependant, en mettant la paume de sa main droite devant lui, le dénommé Wilhelm éjecta sa jeune élève qui avait essayé d’obtenir de lui une affectueuse étreinte. Amy vola à travers le couloir, entra en collision avec son père et enfin, tous deux se dirigèrent avec fracas vers la fenêtre du salon que Sawyer venait de réparer pour la briser à nouveau !
- Bienvenue à toi, Wilhelm ! Fais comme chez toi !! s’époumona Sawyer, à quelques mètres de la demeure, allongé aux côtés de sa fille.
- YEAH !! Merci, merci… Hey Amy !! C’est quoi cette impolitesse ? Tu viens pas accueillir ton professeur adoré ? lança Wilhelm, cherchant la fillette des yeux.
- C’EST CE QUE J’AI FAIT MAIS TU M’AS ENVOYEE PLANER !! beugla Amy, une veine sur la tempe.
- Donc ça plane pour toi ?... Bien, bien, bien… Le contraire m’aurait attristé !
- MAIS NON !! TU DEFORMES TOUT ! explosa Amy, un deuxième nerf ayant fait son apparition.
- En tout cas, comme l’a dit mon crétin de mari, fais comme chez toi, Wilhelm, dit Nausicaa avec cérémonie, refermant la porte derrière le musicien.
- AH NON !! JE FERAI PAS LA VAISELLE !! gloussa-t-il, les bras en croix.
- MAIS NON !! TU DEFORMES TOUT ! vitupéra Nausicaa, cognant son invité sur la tête.
- J’avais raison… Amy et sa mère sont devenues exactement pareilles… releva Sawyer, revenant en compagnie de sa fille dans la pièce où se trouvaient les autres.
- Alors ma petite Amy, tu vas bien ? Tu as épaté tes parents avec les dernières petites choses que je t’ai apprises ? demanda Wilhelm, affichant un large sourire.
- Ouais, ils étaient super impressionnés et tout et tout… Mais moi, je veux connaitre beaucoup plus de secrets ! dit la petite fille, d’un ton admiratif.
- Pas de souci. Le temps viendra où je t’apprendrais encore plus de trucs ! la rassura le professeur.
Tout le monde s’installa alors à table et c’était dans cette atmosphère agréable qu’ils partagèrent un bon repas de famille. Le musicien au caractère un peu fou, fidèle à ses mauvaises habitudes, mangeait comme si sa vie en dépendait et ingurgitait une montagne de nourriture telle que nul n’aurait pu rester indifférent devant cet estomac sur pattes. Amy était totalement écœurée par la gourmandise de son professeur, à plus forte raison encore parce que ce dernier était en proie à une vive envie de viande.
- J’espère que notre fille ne te cause pas trop d’ennuis, Wilhelm… s’enquit Sawyer.
- Ne t’inquiète pas, Sawyer. Amy est une élève prodigieuse, elle maîtrise déjà parfaitement la flûte traversière. D’ailleurs, je n’ai jamais vu quelqu’un progresser aussi rapidement. Un jour, elle deviendra une très grande musicienne, acclamée de tous ! dit Wilhelm, dont la satisfaction se réfléchissait dans sa voix lumineuse.
- Je suis fière de toi ! complimenta Nausicaa à l’adresse de sa fille, laquelle souriait en regardant sa mère qui avait l’air si heureuse.
La famille d’Amy était donc une famille ordinaire mais tellement unie qu’on ne pouvait que les envier. Elle vivait dans la joie et la bonne humeur, ses parents l’aimaient et elle avait un excellent professeur de flûte, qui la chérissait tout autant que s’il avait fait partie de sa propre famille. Amy avait alors un rêve en tête à ce moment de sa vie : elle voulait devenir une grande musicienne, bien qu’elle ne sache pas ce que cela signifiait réellement, afin que ses parents soient fiers d’elle.
Pendant le repas, alors que personne ne s’y attendait, on frappa à la porte pour la deuxième fois de la soirée. Intriguées, les quatre personnes qui étaient assises autour de la table se regardèrent d’un air curieux.
- Tu attends quelqu’un, Nausicaa ? demanda Sawyer, un sourcil remonté et l’autre pas.
- Quelle question, tu sais bien que non, voyons, répondit-elle avec un haussement d’épaule.
Ce faisant, Sawyer alla ouvrir et se retrouva nez à nez avec une personne qui lui était complètement inconnue, habillée d’un pardessus mauve d’une laideur sans nom. L’homme qui n’avait rien à faire là, toisa le seigneur de la propriété un long moment avant de dire, sur un ton tout luisant :
- Salut ! Je m’appelle Gallit, le professeur Wilhelm ne serait pas là, par hasard ? Il m’a invité…
- T’AS INVITE UN MEC LOUCHE CHEZ MOI SANS MON AUTORISATION ?! pesta Sawyer à l’attention de son ami, lequel sifflota en prenant un air angélique.
- Alors ?... interrogea à nouveau l’inconnu.
- Non, il n’est pas là, vous vous êtes sans doute trompé de maison, expliqua-t-il, dépité.
Ainsi, il referma la porte mais à peine eut-il le temps de respirer que l’on frappa encore à celle-ci. Sawyer détailla alors Wilhelm d’un œil noir, ensuite de quoi, il ouvrit avec d’ardentes protestations. Un nouvel inconnu s’érigea devant lui, celui-ci portait un pardessus bleu.
- Salut ! Je m’appelle Gallot, le professeur Wilhelm ne serait pas là, par hasard ? Il m’a invité…
- T’AS INVITE UN MEC LOUCHE CHEZ MOI SANS MON AUTORISATION ?! hurla Sawyer, maintenant habitué à cette situation mais une fois encore, le musicien sifflota d’un air innocent pour esquiver l’accusation.
- Alors ?...
- Non, il n’est pas là, vous vous êtes sans doute trompé de maison, répéta-t-il, encore plus dépité qu’auparavant.
Même protagonistes, même conditions, même scène. Une fois n’était assurément pas coutume, et la porte bourdonna de plus belle, trois secondes seulement après la visite du second inconnu.
- AH NON ! Y’EN A MARRE !! s’exclama la famille Kahelia, en chœur.
- Eh… Ne me regardez pas comme ça, je ne suis pas chez moi… je n’inviterais personne !! s’empressa de dire Wilhelm, voyant que chacun lui jetait un regard de reproche.
- EH BEN, ON DIRAIT PAS DU TOUT !! éclatèrent-ils, toujours d’une seule voix, le corps penché et la main levée.
- Et puis, on m’a dit de faire comme chez moi… ajouta le quadragénaire, les deux mains ouvertes devant lui, comme pour se défendre de ses torts.
- MAIS NON !! TU DEFORMES TOUT ! fulminèrent ensemble Nausicaa et Amy.
Alors que Sawyer se dirigeait d’un pas ferme vers la porte de son domicile, on frappa encore à celle-ci mais avec plus de vigueur cette fois-ci.
- Ça va, ça va, j’arrive, grogna-t-il en ouvrant, quelques instants après.
A la vue des personnes qui se trouvaient sur le seuil, l’homme lâcha un petit cri de surprise avant qu’un énorme sourire ne s’installe sur son visage radieux. Devant lui, il y avait une femme d’une vingtaine d’années et une petite fille qui semblait à peine plus âgée qu’Amy et qui lui ressemblait comme deux gouttes d’eau. La femme portait une casquette bleue et plusieurs colliers autour du cou. Elle était habillée d’un gilet vert, pas du meilleur goût, ainsi que d’un petit short rouge, qui lui donnait un air de paysanne dont le style vestimentaire était dépassé depuis longtemps. La fillette était ravissante en revanche, et ses cheveux blonds lui retombaient sur le front avec grâce. Elle était vêtue d’un petit sweet-shirt qui lui allait à merveille, et d’une jupe bleue ciel qui lui donnait un air de véritable petite princesse.
L’instant de silence dû à l’étonnement passé, la fillette se jeta dans les bras de Sawyer et fondit en larmes.
- Luna, ma petite Luna… Ne pleure pas, papa est là à présent, la consola Sawyer, un sourire rassurant ornant son visage.
- Qui est-ce ? demanda Nausicaa par delà le couloir qui la séparait de la porte.
- Venez vite, vous tous ! C’est Luna, elle est enfin revenue de son séjour à l’hôpital !! cria Sawyer, l’air ravi.
- QUOI ?! s’exclamèrent les trois autres qui étaient restés dans le salon.
Peu de temps après, on entendit un bruit sourd et des pas résonnèrent avant que Nausicaa, Wilhelm et Amy n’apparaissent à leur tour devant Luna. Ils serrèrent tour à tour la fille dans leurs bras et semblaient réellement aux anges de voir le joli minois de la petite… Toutefois, lorsque celle qui allait devenir une future marine renommée voulut embrasser le professeur de musique, ce dernier lui donna un grand coup de poing sur la tête, l’enfonçant jusqu’aux épaules dans le sol !!
- Ravi de te revoir parmi nous, Luna !! chavira Wilhelm, des cercles à la place des yeux.
- OI ! OI ! ESPECE DE SANS-CŒUR !! cria Sawyer, une goutte d’eau derrière le crâne.
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- Eh ! Luna, alors c’était comment l’hôpital ?... J’espère que tu t’es pas trop ennuyée… dit Amy, qui semblait se soucier du bien-être de sa sœur.
- L’hôpital… Ben c’est l’hôpital ! Mais je suis bien contente d’être de retour à la maison ! répondit Luna, le regard dans le vague.
- Moi aussi, je suis super contente de te revoir… murmura Amy, découvrant un léger sourire.
Les deux jeunes filles marchaient dans les rues de leur île natale, Comodo. Amy portait dans ses bras un gros sac de provisions, leur mère leur ayant en effet demandé d’aller faire quelques courses. Luna, elle, était chargée de deux petits sacs, un dans chaque main. Subitement, Amy se tourna vers sa sœur et lui chuchota à l’oreille :
- Au fait, pourquoi tu as dû séjourner à l’hôpital ?... Papa et maman ne veulent pas me le dire…
A cette question, Luna ne répondit rien et sembla bien pensive tout à coup. Elle baissa la tête et regarda ses chaussures, de magnifiques chaussures d’un blanc si pur. Puis, elle se redressa et esquissa un large sourire, sortant de ses réflexions personnelles, avant de regarder Amy avec affection et d’éluder :
- Hihihihi !... Ce n’est pas important, ça… Le principal, c’est que je sois bien revenue, non ?
- Ouais… t’as raison ! dit Amy avec une petite grimace de curiosité.
Elles continuèrent alors leur chemin. Elles passèrent devant un marchand de fleurs et la plus jeune des deux sœurs s’arrêta un instant. Elle paraissait émerveillée par ce spectacle unique : des dizaines de variétés, toutes plus belles les unes que les autres. Luna, qui avait dépassé Amy, n’ayant pas remarqué que celle-ci s’était arrêtée, se retourna et lorsqu’elle vit sa sœur nager dans le bonheur, elle sourit de bon cœur. D’un pas ferme, elle se dirigea vers le marchand et se mit à côté de la fillette qui continuait de contempler la scène enivrante.
- Tu veux une petite rose ? demanda Luna, le visage scintillant de bonté.
- C’est vrai ? Tu peux m’en acheter une ?... Mais on n’a pas assez d’argent, maman ne nous a donné que ce qu’il fallait pour les courses… dit Amy avec regret.
- T’inquiète pas, avec mon séjour à l’hôpital, papa m’a donné un peu d’argent de poche ! Regarde…
Elle lui montra deux billets qu’elle sortit de sa poche, avant de poursuivre en s’adressant au vieil homme qui tenait le stand de fleurs :
- Monsieur, une petite rose, s’il vous plait !
Le fleuriste donna alors une rose parfaite à Amy en échange d’un des deux billets de Luna. Lorsque la fillette eut le présent de sa sœur entre ses mains, un sourire énorme s’installa sur son visage.
- Merci beaucoup, Luna !!... Je t’adore ! Je te dédicacerai le premier album que je sortirai ! s’écria Amy, arborant une voix qui reflétait l’émotion et le contentement.
- Eh ! C’est bon ! Je n’en veux pas de ta signature !... répondit Luna en secouant diligemment une main devant elle, ainsi qu’elle voulait fuir la peste.
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- Papa, maman, nous sommes de retour ! affirma Luna, en franchissant le pas de la porte.
Les deux petites filles entrèrent alors dans la cuisine à leur droite, afin de déposer les provisions, avant de se diriger vers le salon. Dans le couloir, leur mère les arrêta en voyant qu’Amy tenait dans ses mains une jolie petite rose.
- D’où vient-elle cette rose ? demanda-t-elle, intriguée.
- Maman, c’est Luna qui me l’a offerte !! Elle est belle, hein ? s’extasia Amy, un sourire argenté aux lèvres.
Bizarrement, un long moment de silence suivit. L’air était devenu, dirait-on, très lourd. Amy fit de petits yeux car elle ne comprenait pas pourquoi sa mère ne répondait rien. Quant à Luna, elle esquissa un très léger sourire, à peine perceptible. Elle avait une petite lueur démentielle et insondable qui pétillait dans ses yeux. Nausicaa ferma alors les siennes et soupira profondément. Elle prit la rose de sa fille et la renifla longuement tout en hochant la tête par intermittence.
- Hum… Comment te dire ça ?... se questionna-t-elle enfin à elle-même.
A cet instant-là, Sawyer fit irruption dans le passage, aussi promptement qu’à son habitude et se saisit de la fleur dans un mouvement circulaire, exécuté à une vitesse prodigieuse. Il avait tout de suite compris ce que son épouse voulait notifier par son hésitation et ce fut la raison pour laquelle, il la devança en disant :
- AAAAH !! UNE FLEUR DU MAL !! SUS A L’ENNEMIE !!
Sawyer s’éclipsa alors aussi vite qu’il était venu, emportant avec lui la précieuse offrande de Luna.
- Mais qu’est-ce qui se passe ? se renseigna la petite musicienne, interloquée.
- En fait… on ne peut pas garder cette rose à la maison, Amy… parce qu’elle porte malheur ! dit tout à trac Nausicaa.
Amy ne répondit rien et devint écarlate. La petite fille avait instantanément saisi que ses parents ne plaisantaient pas. Ils étaient toujours très doux et attentionnés mais lorsqu’ils avaient décidé d’une chose, ils s’en tenaient fermement. Et même si elle ne comprenait en rien leur comportement disproportionné et inexplicable, elle avait nettement la sensation qu’elle ne pourrait certainement pas récupérer son bien.
- Qu’est-ce qui te prend de parler comme ça ?! C’est un cadeau… pourquoi devrais-je m’en débarrasser ?... Et toi, Luna… Pourquoi tu ne dis rien ?... s’enquit Amy, toujours aussi abasourdie par cette discussion incompréhensible à souhait.
Puis, toutes les trois restèrent silencieuses… Le temps sembla se figer. La maison paraissait tourner sur elle-même tellement cette scène soudaine et brutale était surréaliste. De surcroit, Amy ne saisissait toujours nullement la réaction de ses parents, pas plus d’ailleurs que l’immobilité et la passivité électives de sa sœur. Que se passait-il ? Pourquoi faire toute une histoire pour une simple rose, offerte de bon cœur, par ailleurs ? Mystère…
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- Tu as fugué ?... Mais pourquoi donc ? demanda Wilhelm, pour le moins étonné et qui venait d’ouvrir la porte de sa maison à Amy.
- Mes parents… ils ont jeté ma rose… et c’était un cadeau de ma sœur… balbutia la jeune fille, tentant de ne rien laisser paraitre.
- Aaaah… Il est temps de t’expliquer certaines choses… dit Wilhelm en fermant les yeux et en soupirant après avoir marqué un petit silence.
Les deux personnes entrèrent alors dans le salon de la demeure. Au plafond était accroché un écriteau sur lequel était inscrit : « Kelvin D Wilhelm, musicien ». Wilhelm fit asseoir Amy sur une petite chaise, avant de lui servir un bon thé chaud… enfin plutôt un bon thé brûlant.
- ÇA BRUUUULE !! ne tarda d’ailleurs pas à manifester la jeune fille.
- Ahahah !… Sûr que ce breuvage, c’est pas pour les petites frappes comme toi !...
- Méchant, espèce de vilain pas beau ! Moi, je suis pas une petite frappe !... OUIIIIIN !...
- Ouais, ça se sent !... En tout cas, vois-tu Amy… Tes parents ont été contraints de jeter cette fleur car… ton père y est mortellement allergique !! S’il se retrouvait en présence d’une rose trop longtemps, ce serait un séjour garanti à l’hôpital !! expliqua le musicien, prenant une pose qu’il essayait de faire passer pour dramatique mais qui était en fait ridiculement drôle.
- ON A DES ROSES PARTOUT AUTOUR DE LA MAISON ! s’emporta Amy, les dents en scie.
- Ah, mince… J’ai été négligent ! J’aurais dû inventer une meilleure excuse ! s’écria Wilhelm dont le stratagème avait été mis à jour.
- EH MAIS TU CRAINS !! TU L’AVOUES EN PLUS ! martela Amy, donnant un coup du tranchant de la main sur la tête de son professeur.
- Ahahah !... Bon, d’accord, je vais te le dire ! S’ils ont fait ça, c’est parce qu’ils voulaient te protéger… de la vérité !... dit Wilhelm, un pouce levé en signe de victoire et une étincelle sur les dents.
La protéger de la vérité ? Quelle vérité ? Que pouvaient-ils bien lui cacher ? A toutes ces questions, Amy ne voyait aucune réponse plausible lui atteindre l’esprit. Elle comprenait de moins en moins ce qu’il se passait. D’ailleurs, elle se disait que c’était encore une bêtise déblatérée par l’indécrottable plaisantin qu’était Wilhelm... Mais bientôt, elle fut sortie de sa somnolence par un grandiose coup de poing en plein nez de ce dernier.
- AIEUH !
- T’as failli baver sur ma superbe chaise, pauvre niaise !... J’te rappelle que c’est du bois verni, super cher, importé directement d’Ikea, île paradisiaque du prêt-à-monter !...
Il observa un moment de silence, puis changea radicalement de sujet :
- Mais même après votre dispute… j’imagine que tes parents ont été très sympas avec toi, non ? demanda le professeur, regardant avec insistance sa jeune visiteuse tout en s’affublant d’un affreux nez de clown.
- HEY ! TU PEUX PAS ETRE SERIEUX DEUX SECONDES, ESPECE DE CINGLE ?!
Wilhelm mit alors un index sur chacune de ses joues et d’une petite impulsion, il envoya le nez qu’il venait de s’accrocher sur Amy, laquelle fut touchée en plein front !
- AHAHAH !!... ATTAQUE DU NEZ VOLANT !
- En tout cas, pour répondre à ta question… reprit Amy, dépitée par la gaminerie de son maître de musique et ne souhaitant pas entrer dans son jeu. C’est comme tu l’as dit, ils ont essayé d’être gentils… Mais pourquoi tu m’as demandé ça au fait ?
- Tu sais Amy… La confiance, tu la donnes à ceux que tu aimes… Mais ceux qui la méritent vraiment sont ceux qui restent, même lorsque toi, tu ne les aimes pas assez… Tu devrais faire plus confiance à tes parents… Ils ont toujours été là pour toi ! dit Wilhelm avec un sourire protecteur et pour la première fois, il avait pris une mine sérieuse.
Amy fut consternée par ces quelques paroles… Elle ne s’était jamais imaginé une seule seconde que ce musicien pouvait l’air de rien débiter de telles choses. Elle le savait extrêmement prodigieux une flûte entre les mains mais elle avait toujours pensé que cela s’arrêtait là, qu’en outre, il n’était qu’un blagueur né, un insouciant de toute première catégorie et un éternel enfant.
- Qu’est-ce qui te prend de parler comme ça ? C’est louche tout ça… T’es sûr que tu vas bien ? tenta-t-elle de vérifier pour satisfaire sa conscience.
- RAAAAAH !! SALETE DE MOUCHE !! clama Wilhelm, essayant de chasser la bestiole qui voletait autour de lui par de grands moulinets.
- J’EN ETAIS SURE !! C’ETAIT UN MESSAGE SUBLIMINAL !
- Bien, bien, bien !... C’est pas tout ça mais tu me gênes, petite poussière insignifiante ! N’oublie pas que je dois mettre en place ta scène pour ton concert de ce soir, sur la plage Mirabelle.
- Mirabelle ?... Sérieux ?! Je vais jouer sur la plage Mirabelle, celle qui est maintenue artificiellement en dehors des rayons du soleil par un énorme chapiteau ?!... s’émerveilla Amy, des étoiles pleins les yeux.
- QUOI ?! TU LE SAVAIS PAS ? geignit Wilhelm, une expression gênée s’immisçant en lui et trois gouttes d’eau derrière la tête.
- Ben non…
- EH BEN MAINTENANT TU LE SAIS !! ALLEZ, VA REPETER OU TU SERAS JAMAIS PRETE ! éluda-t-il avec des gestes de panique.
- Euh… souffla Amy, une goutte derrière le crâne.
- En plus, j’ai déjà réservé des places pour ta famille, ce sera l’occasion pour toi de faire la paix ! continua Wilhelm à toute allure.
- OK… Mais, tu vas m’aider à répéter alors ! C’est à cause de toi que je dois jouer une partition sans m’être entrainée, après tout… menaça-t-elle, d’une façon très convaincante.
Il y eut un instant de silence au cours duquel Wilhelm examina attentivement son élève et voyant qu’elle ne plaisantait pas (il savait qu’elle pouvait être redoutable), il répondit :
- Bon, bon… D’accord…
- SUPER !! ALLEZ, ON Y VA !
Sur ces mots, l’éminent professeur, considéré alors comme l’un des plus grands virtuoses de son temps, attrapa sa flûte traversière et commença à jouer un morceau des plus magnifiques où les notes se mélangeaient avec euphonie et qui ne pouvaient que vous entrainer avec douceur dans un pays féérique. Puis, tout à coup, comme pour marquer le passage dans une période trouble, le rythme s’accéléra intensément jusqu’à un final retentissant et ébouriffant mais non moins harmonique. Trois douces notes se propagèrent dans la pièce comme trois coups que l’on frappe sur la porte des rêves… Enfin, reposant son instrument de musique, Wilhelm se mit à applaudir vivement tout en congratulant Amy avec insistance :
- BRAVO !! TU T’ES SACREMENT AMELIOREE ! ÇA Y EST, TU AS ATTEINT MON NIVEAU MAINTENANT !!
- Aaah… Qu’est-ce que ça me fait plaisir que tu me dises ça ! Je fais de mon mieux, tu sais… s’émeut Amy, une petite larme à l’œil.
- EH MAIS !! EN FAIT, ÇA VA PAS DU TOUT ÇA !! Y’A ANGUILLE SOUS BALEINE !!... C’EST MOI QUI AI JOUE !! se rendit compte Wilhelm, prenant conscience du ridicule de la situation.
- Mais non… Par la procuration, c’est comme si c’était moi qui avais joué !
- Flûte alors ! Mais c’est vrai ça !... Je note, je note…
- ARRETE AVEC TES JEUX DE MOTS POURRIS ! vociféra Amy, les yeux en « X ».
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Le soir venu, dans une des nombreuses salles de fête de la plage aux mille merveilles, sobrement appelée Mirabelle, Amy donna sa représentation de flûte traversière. Le concert était fabuleux mais un point noir avait gâché toute la soirée : malheureusement, ni sa sœur, ni ses parents ne s’étaient déplacés pour la voir jouer. Seul Wilhelm l’avait chaleureusement ovationnée.
Une fois dans la rue, Wilhelm, qui marchait à côté de la jeune fille, remarqua qu’Amy semblait légèrement bouder. Depuis la fin de la représentation, elle n’avait presque pas dit un seul mot et le professeur pensait, à juste titre, qu’elle était troublée par l’absence de sa famille. Il s’arrêta alors et s’agenouilla devant l’apprentie musicienne.
- Amy, ne prends donc pas cet air triste et boudeur, je suis sûr que si tes parents ne sont pas venus, c’est sûrement qu’ils avaient une très bonne raison… la rassura Wilhelm.
- Mais tu m’avais pourtant bien dit qu’ils viendraient… Je sais que c’est en partie de ma faute car j’ai fugué mais je comprends pas pourquoi ils sont pas venus… protesta la fillette, visiblement irritée.
- Amy, rentre chez toi maintenant, tes parents t’attendent sûrement. Et tu pourras alors leur demander la raison de leur absence et en profiter pour faire la paix… la conseilla le musicien sur un ton plutôt doux.
- D’accord, professeur !... grogna Amy, toujours contrariée même si elle savait les avis de celui-ci souvent judicieux.
- EHOH !! Arrête de te plaindre et casse-toi, jeune garnement de pacotille ! dit Wilhelm en assénant une petite tape sur la tête de sa protégée.
- C’est bon, j’y vais, espèce de méchant ! répliqua-t-elle, se tenant le crâne des deux mains. Mais je te préviens qu’à partir de maintenant, je ne me ferai plus marcher sur les pieds par toi, na !
Wilhelm s’avança alors vers Amy et d’un air pensif, il écrasa les pieds de celle-ci avec les siens, avant de s’esclaffer comme un gamin.
- MAIS C’ETAIT QUOI ÇA ?! tonna Amy, devenue toute rouge.
- Ben, je voulais juste vérifier si tu étais sérieuse quand t’as dit que tu te referais plus marcher sur…
- MAIS NON !! TU DEFORMES TOUT ! le coupa-t-elle, l’assommant d’un bon coup de boule, ensuite de quoi, elle se prit elle-même la tête et s’écria : OUIIIIIIN !! ÇA FAIT VACHEMENT MAL !!
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Pour rentrer chez elle, Amy devait passer devant la plage Mirabelle. Ainsi, après avoir pris congé du professeur, elle longea la côte et courut sous une fine lumière dorée, se dirigeant vers sa demeure. Mais bientôt, elle vit une horreur indescriptible et s’arrêta net quelques minutes. Elle n’en revenait pas. Et cependant, bien qu’elle ne voulût pas y croire, c’était là, le reflet le plus fidèle de la réalité… Prenant son courage à deux mains, elle marcha d’un pas lent et fébrile vers ce qu’elle venait d’observer. Une fois arrivée à hauteur de l’horrible spectacle, la jeune fille lâcha un cri de douleur terrible en voyant la scène qui se présentait devant elle…
Son père et sa mère étaient étendus par terre, inertes. Une rivière de sang inondait le sable fin, et la plage avait comme été retournée et mise sens dessus dessous. Juste devant la mer se dressait une petite fille dont les mains étaient ensanglantées… Amy mit les siennes sur son visage comme pour se cacher de la vérité et poussa un horrible hurlement étouffé lorsqu’elle vit qui était la personne qui venait de tuer ses parents…
Luna se tenait impassible devant les cadavres de Sawyer et Nausicaa et lançait un regard noir et haineux à Amy, qui, devant cet épouvantable décor, tomba par terre, avant de perdre connaissance… Luna, quant à elle, détourna ses yeux de sa sœur et s’éclipsa sans mot dire… Un épouvantable drame, un drame inconcevable, venait de se produire au bord de l’océan.
「To be continued」